Maj C Smythe OC, MC (1895-1980)

Maj C Smythe OC, MC (1895-1980)

Conn Smythe naît à Toronto, où il grandit et fait ses études. Bien que petit de taille, il excelle dans les sports, particulièrement au hockey. Sa détermination et son ardeur au jeu en font un adversaire redoutable; il sera d’ailleurs capitaine des “Varsity Juniors” de 1914-1915.

Quand la guerre se déclare en Europe, Conn, alors âgé de dix-neuf ans, tente de s’enrôler dans le Princess Patricia’s Canadian Light Infantry; on le croit trop jeune alors qu’il n’est en fait que pas très grand et on lui répond que “les enfants ne sont pas admis dans ce bataillon!”. Il finira par se joindre à la 25e Batterie de la Canadian Field Artillery. Devenu officier en 1915, il est invité à faire partie de la 40e Batterie, la “Batterie des sportifs”.

Sa batterie, qui fait partie de l’artillerie de la 3e Division canadienne, arrive en Angleterre en mars 1916 et, à la mi-juillet de cette même année, se retrouve dans une position de canon au Saillant d’Ypres. Il prend part à la série de batailles légendaires qui suit : la Somme, Courcelette, Mont St-Éloi et Arras. A ce dernier endroit, des observateurs d’artillerie se joignent à l’infanterie pour la première fois; le jeune lieutenant Smythe accompagnera ainsi les Cape Breton Highlanders dans leurs assauts. Il se mérite alors la Croix militaire; la citation le concernant dans la Gazette du Canada se lit comme suit :

“Pour sa bravoure évidente et son sens du devoir.
Il organisa un groupe d’hommes et il les mena à l’attaque avec beaucoup d’élan,
ainsi dispersant une formation ennemie à un moment critique de la bataille.
Il a été lui-même responsable d’élimination de trois adversaires avec son revolver.
Il s’est précédemment montré à la hauteur de la tâche.”

Après le triomphe des Canadiens à la Crête de Vimy, le lieutenant Smythe passe au Royal Flying Corps comme pilote observateur d’artillerie. Le 18 octobre 1918, il est blessé lorsque son appareil est abattu à Passchendaele; suivent 14 mois comme prisonnier de guerre puis le retour à Toronto en février 1919.

Même si la pratique du hockey lui est désormais interdite à cause de ses blessures de guerre, il ne continue pas moins de s’y intéresser vivement et devient entraîneur-gérant des Varsity Grads, qui remportent la Coupe Allan en 1927 et représentent le Canada aux Olympiques de 1928. Ces succès l’amènent à la Ligue nationale comme entraîneur des nouveaux Rangers de New York. Il passe rapidement aux Pats de Toronto dont il devient propriétaire à la fin de 1927. Il s’empresse de changer le nom de l’équipe qui devient les Maple Leafs de Toronto et dont l’emblème, une feuille d’érable, est l’insigne de coiffure du Corps expéditionnaire canadien. A la fin de 1931, malgré la crise économique qui fait rage, il ouvre le Maple Leaf Gardens et remporte la Coupe Stanley le printemps suivant.

Il a 44 ans lorsqu’il est à nouveau appelé sous les drapeaux. En juillet 1940, il devient capitaine au sein du Corps-école d’officiers canadiens et encourage ses employés à s’enrôler; rapidement, 25 d’entre eux répondent à son invitation. Empêché de se rendre outre-mer, il se remémore son expérience du premier conflit et met à sur pied une autre “Batterie des sportifs”. En septembre 1941 est ainsi formée la 30th Battery 7th Toronto Regiment qui accueille des athlètes de nombreuses disciplines. Au printemps de 1942, alors que Conn Smythe prend part à un cours de commandant de batterie à Petawawa, ses Leafs perdent les trois premières parties de la finale de la Coupe Stanley contre Détroit. Toutefois, dans un revirement sans précédent, ils parviennent à renverser la vapeur et à remporter la Coupe en gagnant les quatre autres matchs de la série!

Après des affectations liées à la défense antiaérienne sur les deux côtes canadiennes, sa batterie s’embarque pour l’Angleterre en octobre 1942. Déployée à Colchester pour commencer, elle se rend rapidement dans le sud et, plus tard, s’installe près de Douvres à l’appui de l’invasion de la Normandie.

Cinq semaines après le Jour J, Conn accompagne sa batterie sur le continent et l’y mène au combat. On lui demande d’appuyer l’Opération “SPRING”, une poussée du 2e Corps d’armée canadien effectuée à partir de Normandie. Affectée à la protection des ponts de l’Orne à Caen, la Batterie est la cible de bombardements soutenus de la Luftwaffe; bon nombre de ses véhicules sont endommagés et en flammes et le major Smythe organise rapidement des équipes de “pompiers” qui parviendront à en sauver la majeure partie. Les bombardements se poursuivent deux nuits durant, faisant quatre morts et quatorze blessés, dont le major Smythe qui est gravement atteint au dos et à la colonne vertébrale par des éclats d’obus.

Amené dans un centre d’évacuation des victimes, il passe une nuit d’enfer à demander de l’aide, laquelle n’arrivera que le lendemain matin. Il commence à entendre de troublantes rumeurs qui parlent de pénuries graves d’effectifs, de soldats mal entraînés et d’unités décimées qu’on envoie dans la bataille comme renforts. En convalescence à l’Hôpital neurologique No 1, il recueille des informations qui, malheureusement, viennent confirmer ses craintes. De retour au Canada, il se rend compte que le grand public n’est pas au courant de la gravité de la situation. Il raconte ce qu’il sait au Globe and Mail qui publie un éditorial acerbe. La réaction ne se fait pas attendre; le ministre de la Défense se rend en Normandie et confirme qu’on manque de renforts correctement entraînés. Ce triste épisode mettra un terme à la carrière militaire de Conn Smythe.

Après sa convalescence, il revient au hockey et son équipe remporte la Coupe Stanley en 1945, 1949 et 1951. Sa blessure l’a rendu invalide mais elle lui est une source d’inspiration pour venir en aide aux plus démunis. Il se lance dans des activités philanthropiques et se dévoue pour la Société d’Ontario pour les enfants invalides, la campagne annuelle du timbre de Pâques, le Scarborough Variety Village, le Crippled Children Centre et l’Ontario Community Centre for the Deaf.

La contribution de Conn Smythe au Canada, à son milieu et au sport lui vaut l’Ordre du Canada en 1980. Le major Conn Smythe, homme d’affaires, soldat et sportif, bâtisseur de la nation canadienne et membre estimé du Régiment royal meurt dans son sommeil le 18 novembre 1980.